Parentalité et Alya

Organiser son Alya c’est aussi laisser derrière soi des blessures de vie, certains systèmes et fonctionnements que l’on veut modifier, abroger voir oublier.

Ainsi pour beaucoup de familles, l’arrivée en Eretz est porteuse d’espoirs, de désirs multiples et d’aspirations plus ou moins idéalisées. Ces projections vers un avenir autre sont dynamisantes mais président forcément à certaines déceptions pas toujours faciles à relativiser, ni même faciles à vivre.

De fait si le changement est espéré, la famille n’est toutefois pas favorable aux changements radicaux en matière  d’éducation.

Ainsi ses valeurs éducatives, ou encore ses convictions et ses « principes » éducatifs restent complexes à bousculer.

L’éducation de ses enfants
, comme la représentation de sa famille et de ses codes de communication, participent de la sphère privée et se véhiculent aisément dès lors qu’ils s’appliquent dans son contexte social.

En arrivant en Eretz,  ces sphères privées sont bousculées, questionnées voir malmenées…

Pourtant, ces valeurs mêmes privées ne sont jamais tout à fait dissociées du système dans lequel on évolue, elles s’en imprègnent même à notre insu, souvent même avant notre conscience. L’éducation de l’enfant est de loin, la dimension qui questionne le plus la famille qui très vite, perçoit que quelque chose lui « échappe »!!!!

Bien que la décision de venir vivre en Israël soit investie et consistante, il n’est pas rare d’entendre des Olés francophones formuler leurs inquiétudes quant aux valeur éducatives, quant à l’éducation même de leurs enfants, quant au fonctionnement de sa famille…

En fait les capacités d’adaptation que tout Olé déploie en arrivant sont dans un premier temps factuelles, elles permettent  de s’inscrire dans un nouveau quotidien, d’adopter les postures du pays d’accueil, la mise en place des premiers outils de communication.

Ce qui pose soucis, qui déstabilise, c’est précisément ses propres repères « fondamentaux », devenus subitement si complexes à appliquer, si en décalage;

Ce qui paraissait jadis  » couler de source » semble rapidement inopérant voir obsolète.

Je rencontre ainsi, des parents anxieux, soucieux de garder leurs convictions éducatives mais constatant que celles-ci sont en décalage.

Beaucoup de mes patients disent leurs inquiétudes et leurs angoisses concernant les changements d’attitude de leurs enfants.

Pourtant leurs enfants sont visiblement heureux ici, plus « détendu », trop détendus disent certains….

De fait, ces enfants changent de posture, d’exigences, de principes relationnels, de rapports à autrui, de forme de liens à l’adulte…

Car l’enfant absorbe beaucoup plus vite que son parent toutes les nouvelles données qui se présentent à lui. En somme, il s’approprie rapidement ces codes relationnelles et affectifs, ces codes sociaux qui sans doute le valorisent plus.

Très vite l’enfant, par soucis d’intégration mais aussi par nécessité de conformisme, s’imprègne des nouvelles donnes, revisite les limites que cette nouvelle lui offre.

J’entends des parents qui se sentent, souvent à tord, débordés comme démunis dans cette fonction parentale qu’ils « géraient » si naturellement avant l’Alya. Car ce système disent-ils « n’est pas notre système »…. Ce système n’est en effet pas le même quant aux limites et à l’indépendance accordée aux enfants, quant à la place et aux droits de l’enfant.

Certains parents se sentent même comme dépossédés de toute autorité sur l’enfant…il n’en est pourtant rien sur le fond.

Il s’agit pourtant d’une confrontation plus ou moins difficile entre ses valeurs fondamentales et les nécessités du contexte. Une confrontation qui ne va pas tarder à générer des conflits entre parents et enfants mais surtout, entre les parents eux même. Chacun en effet espérant que l’autre trouve remède à cette perte de contrôle.

Je rencontre en soutient thérapeutique des jeunes et moins jeunes parents qui ne se retrouvent plus dans l’organisation familiale qui se dessine peu à peu et qui les plonge dans un vrai désarroi.

Beaucoup vont choisirent la critique systématique des modalités éducatives existant en Israël, certains vont remettre en question le choix de cette Alya finalement si « menaçante » pour l’équilibre qu’ils s’étaient choisit.

L’accompagnement thérapeutique peut aider à intérioriser ces changements sans pour autant perdre ses valeurs éducatives. Le soutient du parent ou du couple s’avère d’ailleurs souvent plus pertinent que le soutient de l’enfant, en ce sens qu’il met en place des outils pour l’accompagnement de l’enfant, tout en soutenant l’adulte dans sa propre adaptation.

Enfin les déstabilisations des parents peuvent être « désamorcées » pour peu qu’on prenne soin de les comprendre et de les verbaliser.

 

Joelle Levy – Psychologue a Tel Aviv
Cabinet Francophone de Psychologie Clinique a Tel Aviv